Ruche et biodiversité
L’apiculture : une activité qui a le vent en poupe
La raréfaction des insectes et la crainte de ne plus voir nos fruits et légumes pollinisés par les abeilles, ont engendré un regain d’intérêt pour l’apiculture. Le miel, d’origine parfois douteuse, vendu dans les grandes surfaces, a poussé certains d’entre nous à tenter l’aventure. Le besoin de se (re)connecter avec la nature en accueillant une colonie d’abeilles dans son jardin, de suivre son évolution au cours des saisons, permet de mieux comprendre les interactions entre le vivant et son milieu. L’apiculture a donc son intérêt, mais ne peut être associée à la biodiversité.
biodiversité et apiculture : problématique par définition
Une ruche dans votre jardin c’est, en moyenne, 60 000 individus de la même espèce. Un hôtel à insectes de la taille d’une boite à chaussures, peut accueillir plusieurs dizaines d’individus d’au moins 4 ou 5 espèces différentes d’abeilles. La biodiversité étant « la diversité des espèces vivantes présentent dans un milieu » s’accommodera donc mieux d’un hôtel à insectes que d’une ruche.
Concurrence alimentaire…
Les abeilles domestiques récoltent pollen et nectar dans un rayon de 3km. 60 000 individus à nourrir à la belle saison, un peu moins l’hiver, et le miel récolté par l’apiculteur, tarissent les sources alimentaires de pollen et de nectar qui n’iront pas au reste de la biodiversité, dont les 900 espèces d’abeilles sauvages en France.
…Variable selon les espèces
Les abeilles sauvages ayant une trompe plus longue que les abeilles domestiques, pâtissent moins de la concurrence alimentaire imposée par celles-ci, puisqu’elles vont se nourrir dans des fleurs dont le nectar n’est pas accessible aux ouvrières de la ruche. Ce n’est pas le cas des abeilles solitaires généralistes, dont la trompe est plus petite que les abeilles domestiques.
Evolution de la végétation
Certaines espèces de plantes sont étroitement liées à une espèce d’abeille solitaire qui ne visite quasi que cette plante, rendant leur pollinisation très efficace, indispensable à la survie du végétal. Dans le cas d’une surabondance d’abeilles domestiques beaucoup plus généralistes au niveau de l’alimentation, le pollen si précieux de ladite plante, se retrouve éparpillé sur un grand nombre de fleurs qui n’en n’ont que faire. Ainsi perdu, ce pollen ne participe pas à la reproduction, affaiblissant la survie de l’espèce. Cela peut avoir, à la longue, un effet sur l’évolution de la végétation, favorisant les plantes les plus abondantes au détriment d’espèces plus spécifiques.
Hériade sp et sa boule de résine pour fermer son nid. Osmie rousse femelle Osmie cornue mâle et sa moustache blanche caractéristique Hylaeus sp
Menace sur l’abeille noire
Enfin, l’apiculture sélectionne des espèces très productives ou très douces pour ne pas se faire dévorer à chaque visite. Italiennes, Russes, les souches sont multiples. Ainsi, l’abeille noire, espèce locale d’abeille sauvage dont sont issues nos abeilles domestiques, se voient également menacées de disparition par croisement avec ces souches d’horizons diverses.
La ruche et le poulailler
Pour conclure, un parallèle peut être fait avec les poules : installer un poulailler ne permet pas de lutter contre le déclin des oiseaux du jardin… Introduire des abeilles au jardin ne permet pas de lutter contre le déclin des insectes… bien au contraire.